Vous trouvez la rentrée dure, avec ses réveils aux aurores? Vous n'êtes pas seul, et vous n'avez surtout pas tort. Un chercheur d'Oxford vient de confirmer, en pire, ce qu'on savait tous déjà : se priver de sommeil, c'est de la «torture», dénonce-t-il. Rien de moins. Explications en quatre questions.

Paul Kelley est chercheur clinique à l'Institut des neurosciences du sommeil et du cycle circadien de l'Université d'Oxford. Ses propos ont fait les manchettes plus tôt en septembre, lorsqu'il a déclaré au Telegraph de Londres que le fait de se lever tôt, pour travailler de «9 à 5», correspondait à une véritable «torture». Il a accepté de répondre à nos questions par courriel.

On savait déjà qu'on manquait tous cruellement de sommeil, or voilà que la solution n'est pas de se coucher plus tôt, mais bien de se lever plus tard?

«Oui, la solution, c'est de se lever plus tard», confirme le chercheur. Pour la simple et bonne raison que le rythme circadien des adultes, et ce, jusqu'à 55 ans environ, est ainsi fait. Ce cycle physiologique ne concorde malheureusement pas avec un horaire typique de 9h à 17h. Comme chez les adolescents, qui, typiquement, se couchent tard et devraient pouvoir se lever tard, les adultes aussi suivent plus ou moins ce rythme. Et ils devraient donc le respecter, pour suivre leur horloge interne, finalement. Quoi penser des parents de jeunes enfants qui n'ont d'autre choix que de se lever avec leurs gamins ? «Non, malheureusement, il n'y a pas non plus de concordance entre l'horloge interne des parents et celle de leurs enfants. Comme bien des parents, ma conjointe et moi prenions des quarts, pour récupérer chacun notre tour.»

Se priver de sommeil équivaudrait carrément à de la torture?

«Ce que j'ai dit, nuance Paul Kelley, c'est que la privation de sommeil est effectivement une technique de torture. Le point à retenir, c'est qu'en forçant les gens à travailler ou aller en classe trop tôt, cela a des conséquences sur leurs performances, leur humeur et leur santé. Dans les cas les plus sévères, notamment chez les 14-24 ans, mais dans d'autres groupes d'âge également, les gens finissent par perdre 24 heures de sommeil par semaine. Une semaine à ne dormir que 5,7 heures, par exemple, peut modifier la transcription de plus de 700 gènes.»

Ce ne sont pas que les adultes, mais aussi les adolescents, même les enfants qui souffrent de manque de sommeil?

«Oui, les enfants dès 10 ans souffrent d'un manque de sommeil», répond le chercheur, qui en a fait l'expérience de première main. Directeur d'une école secondaire dans une autre vie, il a testé son hypothèse auprès de ses élèves. Résultat ? En les faisant commencer une heure plus tard (à 10h au lieu de 9h), leurs notes ont bondi de 19 %. Une autre étude, menée cette fois auprès de 30 000 élèves au Royaume-Uni et dont les résultats sont attendus pour 2018, vise à confirmer les conclusions de cette expérience. D'après les dernières recherches sur les rythmes circadiens, un enfant de 10 ans ne peut pas se concentrer adéquatement avant 8h30, un jeune de 16 ans, avant 10h, et un étudiant universitaire devrait idéalement commencer à 11h.

Et vous pensez que toutes ces découvertes sont de bonnes nouvelles? Éclairez-nous...

«Mais parce qu'on peut améliorer non seulement la performance, mais aussi l'humeur, la santé mentale et physique des gens, en modifiant tout simplement leurs horaires ! Nous pouvons aussi améliorer la qualité du sommeil des gens en les informant, notamment de l'importance d'éteindre toutes les sources de stimulation (écrans, téléphones, etc.) une heure avant de se coucher.»