John Tortorella aurait très bien pu ne plus jamais être entraîneur-chef dans la Ligue nationale de hockey. Ça s'était mal terminé avec les Canucks de Vancouver - il avait été limogé après la première année d'un contrat de cinq ans - et ses méthodes abrasives auraient pu le mettre au ban plutôt que derrière un banc.

Or, le DG des Blue Jackets Jarmo Kekalainen a fait appel à lui pour redresser la barque à Columbus, où les attentes étaient grandes en début de saison. L'équipe avait été décimée par les blessures l'an dernier, mais il n'y avait plus d'excuses pour qu'elle démontre sa compétitivité cette saison.

Or, on sait ce qui est arrivé: après sept revers successifs, l'entraîneur-chef Todd Richards a perdu son emploi.

«Je suis très chanceux d'avoir une autre opportunité», admet humblement Tortorella qui, un peu comme Michel Therrien au moment de son embauche par le Canadien, a reconnu avoir changé quelque peu. À vrai dire, il fallait qu'il revoit certaines pratiques s'il voulait poursuivre sa carrière dans la LNH.

Personne chez les Blue Jackets n'est mieux placé que Brandon Dubinsky pour parler du «nouveau» Tortorella. Les deux hommes se sont connus chez les Rangers de New York où ils avaient développé une relation acrimonieuse.

«On change tous un peu avec les années et l'expérience, indique Dubinsky. Mais ce qui n'a pas changé dans son cas, c'est l'engagement qu'il réclame de ses joueurs. Il veut que les joueurs jouent de la bonne façon, qu'ils soient impliqués et qu'ils bloquent des lancers. Il n'a pas changé sur ce plan-là.

«L'équipe avait besoin de beaucoup de travail et il nous a beaucoup aidé. Il a mis en place un système auquel on doit se fier si l'on veut gagner des matchs. Si on l'applique, il va nous récompenser par du temps de glace et des journées de congé.

«Il est peut-être un peu plus réservé que ce qu'il était à New York, mais en même temps, c'est encore le même homme. Il attend beaucoup de nous.»

Tortorella est peut-être plus affectueux avec ses quatre chiens qu'avec ses joueurs, mais il assure que la fraternité est quelque chose qui lui manquait durant les 17 mois passés loin de la LNH.

«Ce dont je me suis ennuyé le plus, c'était d'être avec les joueurs, dit-il. Après un match émotif, de pouvoir entrer dans le vestiaire avec la musique forte et ce sentiment collectif qu'on vient d'accomplir quelque chose... Je m'ennuyais de voir cela. Je m'ennuyais de la camaraderie autant que de me péter la tête sur un mur après une défaite en voulant en tirer les leçons.

«Les entraîneurs veulent s'imbiber de la pression des matchs et voir comment leurs joueurs vont réagir, bien ou mal.»

Beaucoup d'enseignement 

Les Blue Jackets forment probablement le plus jeune groupe avec lequel Tortorella ait eu à travailler dans la Ligue nationale. Et ça ne lui pose aucun problème, bien au contraire.

«Avant même qu'ils sautent sur la glace, il faut leur enseigner à être des professionnels, à bien se préparer en vue des matchs, explique-t-il. Et une fois la partie commencée, ils doivent apprendre à gérer les changements de momentum à l'intérieur du match ou encore à tourner la page après une défaite. Ils ne sont pas supposés savoir tout ça; alors on le leur enseigne.

«C'est ce que j'aime de l'opportunité qui m'a été offerte. Il y a beaucoup d'enseignement à faire avec un groupe aussi jeune.»

L'ironie dans tout ça, c'est que l'un de ses jeunes joueurs chez les Rangers est aujourd'hui l'un de ses joueurs-clés avec les Blue Jackets. Brandon Dubinsky et lui ne s'entendaient pas à Manhattan, mais Tortorella a fait une éloge bien sentie de son leadership, mardi matin.

«"Dubie" entraîne ses coéquipiers et les mène au front parce que c'est un joueur très émotif. Il est tellement compétitif que si tu ne le suis pas, il va te prendre par le bras. Je vois tellement plus de maturité chez lui que ce que je voyais à New York. C'est énorme pour notre équipe parce que notre groupe découvre encore à quel point il faut travailler fort pour avoir du succès dans cette ligue.»