Le Canada n'a pas perdu de temps à manifester son courroux à la suite de la décision de l'Assemblée générale de l'ONU d'accorder à l'Autorité palestinienne le statut d'État observateur non membre.

Le gouvernement Harper a annoncé hier qu'il rappelle temporairement les chefs de mission du Canada en Israël et à Ramallah ainsi que les représentants canadiens en poste à l'ONU à New York et à Genève afin d'évaluer les retombées de ce vote et de déterminer les mesures qui devraient être prises à la lumière de cette décision.

Après une campagne habilement menée par le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, l'ONU a adopté par un vote de 138 voix pour et 9 voix contre (et 41 abstentions) une résolution accordant à l'Autorité palestinienne le statut d'État observateur. Le Canada, les États-Unis et Israël faisaient partie des voix discordantes. La France a appuyé la résolution tandis que la Grande-Bretagne s'est abstenue.

Le ministre des Affaires étrangères, John Baird, a fait savoir que le Canada compte réévaluer «tous les aspects de ses relations bilatérales avec l'Autorité palestinienne».

«Le Canada est profondément déçu mais non surpris du résultat du vote tenu à l'Assemblée générale des Nations unies. La position de notre gouvernement est claire: seule la négociation mènera à une paix juste et durable, et non les mesures unilatérales», a déclaré le chef de la diplomatie canadienne.

Relations bilatérales revues

«La mesure unilatérale prise [jeudi] n'apporte rien pour faire progresser le processus de paix au Moyen-Orient. Elle ne changera pas la réalité dans les rues de la Cisjordanie ou de Gaza. Cette démarche unilatérale constitue un obstacle à la paix», a-t-il ajouté.

Dans une entrevue à la CBC, M. Baird n'est pas allé jusqu'à dire que le Canada ne reconduira pas le programme d'aide de 300 millions en cinq ans aux Palestiniens. Ce programme prend fin en principe en mars 2013. Il s'est aussi défendu de rompre les relations avec les autorités palestiniennes.

«Nous exhortons de nouveau l'Autorité palestinienne et Israël à reprendre les négociations sans condition préalable, pour le bien de leur population», a ajouté le ministre, qui s'est rendu à New York jeudi pour exprimer de vive voix l'opposition du Canada.

Le gouvernement Harper est convaincu que l'Autorité palestinienne, forte de son statut d'État observateur non membre à l'ONU, tentera à nouveau de convaincre la Cour pénale internationale d'ouvrir une enquête dans le cadre du conflit israélo-palestinien afin de poursuivre en justice des responsables d'Israël pour des crimes de guerre présumés.

Le Nouveau Parti démocratique a accusé le gouvernement Harper d'aller trop loin en rappelant ainsi des diplomates canadiens et d'abdiquer complètement sa neutralité dans ce conflit. Le député Paul Dewar a fait valoir que le Canada s'isole de plus en plus en se rangeant sans équivoque du côté d'Israël.

Colonisation

Dans ce qui ressemble à un geste de représailles, le gouvernement israélien a indiqué hier son intention de construire 3000 logements supplémentaires dans des colonies à Jérusalem-Est et en Cisjordanie.

Ce projet, gelé depuis des années sous la pression américaine, vise à rattacher la colonie de Maalé Adoumim (35 000 habitants), en Cisjordanie, à des quartiers de colonisation de Jérusalem-Est, occupé et annexé depuis 1967. Ce projet est vivement dénoncé par les Palestiniens, car il couperait pratiquement en deux la Cisjordanie, ce qui compromettrait la viabilité d'un État palestinien.

En novembre 2011, après l'accession de la Palestine au statut de membre à part entière de l'UNESCO, Israël avait également accéléré la construction dans les colonies.

Avec l'Agence France-Presse