Au moins dix-sept morts, quatre disparus : les intempéries qui ont dévasté la Côte-d'Azur dans la nuit de samedi à dimanche, ont laissé un paysage de désolation de Nice à Cannes, où les habitants pouvaient enfin espérer dimanche soir une nuit de repos.

Dimanche, les sinistrés ont tenté toute la journée de sauver chez eux, sous une épaisse couche de boue, ce qui pouvait encore l'être. Dans des rues à la chaussée parfois arrachée, des épaves de voitures enchevêtrées, des arbres à terre, et des habitants, bottes au pied, qui contemplent le désastre.

Après une nuit d'angoisse samedi et une journée d'attente, quelque 250 sinistrés d'Antibes ont été répartis dans des hôtels des environs. «Ils sont tous très marqués, certains traumatisés, il a fallu leur annoncer qu'il y avait eu des morts», a relaté Vanessa, qui orientait les sinistrés vers leurs hôtels.

Dans toute la zone touchée par les intempéries, une trentaine de kilomètres le long du littoral, de Mandelieu-la-Napoule à Nice, les secours se sont activés pour retrouver des survivants. Ils poursuivront leurs recherches toute la nuit, ne perdant pas espoir de retrouver les quatre personnes toujours portées disparues, une à Antibes, deux à Cannes et une à Mandelieu-la-Napoule.

Cette dernière commune paye un lourd tribut, avec au moins sept morts, pris au piège dans le parking de leur résidence en essayant probablement d'aller mettre leur voiture à l'abri. La lame d'eau qui a déferlé ne leur a laissé aucune chance.

Apocalyptique 

Dans les sous-sols, «l'eau est tellement opaque que les pompiers ne voient pas les corps. (...) C'est apocalyptique», a décrit le maire, Henri Leroy. Les secours ont sorti au fur et à mesure des corps des parkings, transportés ensuite par des fourgons de pompes funèbres.

«Encore une fois, il faut qu'on prévienne qu'à un moment il vaut mieux laisser sa voiture que laisser sa vie», a commenté le président de la République François Hollande, en déplacement sur les lieux des intempéries.

À Biot, ce sont trois résidents d'une maison de retraite qui ont perdu la vie.

«Nous avions deux salariés qui assuraient la surveillance de la maison de retraite cette nuit et des 48 pensionnaires», a raconté Jean-Christophe Romersi, responsable de la direction de l'établissement. «Mais elles se sont retrouvées coupées du monde, dans l'impossibilité de prévenir les secours par téléphone», et n'ont pu sauver les trois personnes âgées, résidant au rez-de-chaussée.

Les inondations ont également fait des victimes à Vallauris-Golfe Juan où une famille de trois personnes a péri dans une voiture en empruntant un petit tunnel en cours d'inondation, et à Antibes où une femme a été emportée par les flots dans un camping.

Partout, les sinistrés ont raconté avoir été surpris par la violence et la rapidité des orages.

«J'ai passé cinq heures avec de l'eau jusqu'au cou. Je me suis accrochée à mon mobil home. J'ai pensé que j'allais mourir», se remémore Christin, une touriste allemande rencontrée à Antibes. Enfin, «dans les dernières minutes, un hélicoptère est arrivé».

Claude, raconte avoir eu très peur, lorsqu'il s'est réveillé et a compris qu'il ne pouvait plus ouvrir la porte de son mobil home, à l'intérieur duquel l'eau montait, dans un camping d'Antibes. «A un moment, j'ai entendu un hélicoptère, alors j'ai pris ma torche électrique (...) et les pompiers sont venus».

Catastrophe naturelle 

Les dégâts matériels n'ont pas pu être chiffrés mais ils s'annoncent extrêmement lourds, à l'image peut-être des pluies torrentielles qui avaient fait en juin 2010 dans le Var 25 morts, 31 560 sinistrés et près d'un milliard d'euros de dégâts.

Dans les Alpes-Maritimes, 10 000 foyers s'apprêtaient à passer la nuit de dimanche sans électricité, et 15 écoles, un collège et un lycée resteront fermés lundi. Le trafic des trains, et dans certains endroits le réseau téléphonique, resteront perturbés.

Face à cet épisode d'une intensité exceptionnelle, le département a annoncé le déblocage immédiat «d'une enveloppe de 5 millions d'euros» et la Région a promis une aide exceptionnelle d'urgence de 4 millions d'euros.

De son côté, le président François Hollande a souligné que l'état de catastrophe naturelle serait déclaré dès mercredi en Conseil des ministres, un point clé pour le versement des indemnisations.

Dans un département qui avait été placé en vigilance orange par Météo France, c'est l'intensité des précipitations, en trois heures de temps, qui a surpris : entre 19h00 et 22h00, 180 mm d'eau sont tombés à Cannes, 159 mm à Mandelieu-la-Napoule, et 100 mm à Valbonne, près de Biot, des niveaux record.

«Il y a toujours eu des catastrophes, mais leur rythme, leur intensité se sont renforcés», a jugé François Hollande, en profitant pour appeler à «prendre des décisions» pour lutter contre le réchauffement climatique alors que la France accueillera à la fin de l'année la conférence sur le climat Cop21.