La présence de migrants sur les voies d'accès au tunnel sous la Manche et plus encore un incident technique sur une motrice ont paralysé pendant des heures le trafic Eurostar entre Paris et Londres dans la nuit de mardi à mercredi, contraignant les passagers d'un de ces trains à une nuit de galère près de Calais.

Le trafic ferroviaire entre la France et la Grande-Bretagne est revenu à la normale en fin de matinée, après qu'un Eurostar a quitté vers 10 h 35, à destination de Londres, la gare de Calais-Frethun, peu avant l'entrée du tunnel. Il transportait environ 700 passagers bloqués depuis la soirée de mardi.

Ces passagers avaient embarqué la veille à 19 h 42 de la gare du Nord à Paris à bord de l'Eurostar 9055.

Les problèmes ont commencé peu avant 21 h mardi, selon la préfecture du Pas-de-Calais qui s'est efforcée de reconstituer le déroulement de ce scénario noir mêlant plusieurs acteurs (SNCF, Eurotunnel, Eurostar, police des frontières, gendarmerie, douanes). Selon Eurostar, les incidents ont débuté vers 22 h 30.

Des migrants ont été repérés sur les voies dans le but de monter sur un Eurostar, avant même la gare de Calais-Frethun, en amont des clôtures de sécurité de 4 m de haut posées le mois dernier par Eurotunnel pour empêcher l'accès au tunnel. Ils étaient «100 à 150», selon une source policière locale.

Quelque 3000 réfugiés, venus principalement d'Afrique, séjournent à Calais et ses environs et cherchent régulièrement à passer en Angleterre, qu'ils considèrent souvent comme un Eldorado.

Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a rappelé mercredi que ces «intrusions» avaient «diminué considérablement» ces dernières semaines, l'objectif étant de les «réduire à zéro».

«On n'a pas vu des migrants, mais on savait qu'il y en avait un peu partout sur le toit et c'est pour cela qu'on a attendu qu'un hélicoptère s'assure qu'il n'y ait pas de migrants au-dessus de nous», a rapporté Clothilde, 23 ans, une Française qui habite à Londres.

«On est restés environ quatre heures à côté du tunnel, on voyait des policiers passer à la hâte dans le train», a-t-elle confié.

Selon la préfecture, «à 1 h 30, les migrants ont été évincés par les forces de l'ordre, le train aurait pu repartir dans la foulée». C'est alors qu'une fuite de gaz, «sans aucun risque d'explosion» selon la préfecture, a été détectée sur la motrice arrière du train. Le convoi a alors été remorqué jusqu'à la gare de Calais-Frethun.

Passagers excédés

Eurotunnel a été catégorique: «Il n'y a pas de migrants qui se sont introduits dans le tunnel sous la Manche», ils «étaient sur les voies» en amont de l'ouvrage.

Mais du fait de la présence de migrants montés sur le train, «il a fallu faire descendre tout le monde pour procéder à la fouille des rames», selon une source policière.

Eurotunnel avait pointé récemment les failles du site de Calais-Frethun dépendant de la SNCF, réclamant qu'il «soit davantage sécurisé». Entretemps, SNCF Réseau a affirmé qu'il s'attelait à faire le nécessaire.

Une fois débarqués à Calais-Frethun, les passagers ont d'abord dû rester sur les quais. Ils ont été autorisés à entrer dans la gare elle-même vers 6 h, selon des témoignages recueillis par l'AFP.

De la nourriture, de l'eau et des couvertures de survie ont été données aux passagers, tandis que les secours ont accouru notamment pour des personnes âgées, selon un correspondant de l'AFP sur place.

Une passagère de l'Eurostar, Géraldine Guyon, a cependant assuré à l'AFP que la nourriture n'avait été distribuée que vers 7 h 30. Une annonce officielle d'excuses «a été huée», a-t-elle dit. La dernière communication officielle par haut-parleur avait été faite vers 1 h 30, indiquant qu'un train viendrait chercher les passagers pour les acheminer à Londres, a-t-elle également déclaré.

Cinq autres Eurostar ont été affectés par ces incidents. «Un train (Paris-Londres, NDLR) est reparti vers Paris, un autre (Londres-Paris) a rebroussé chemin vers Londres et trois autres sont bien arrivés à Londres», a fait savoir Eurostar.

Eurotunnel a dénombré jusqu'à 2000 tentatives d'intrusion par nuit fin juillet, avant une décrue à 100 ou 200 en moyenne ces derniers jours. Au moins neuf migrants sont morts sur ou aux abords du site depuis début juin.