Des embouteillages monstres bloquaient lundi la frontière entre la Hongrie et l'Autriche, où les contrôles ont été renforcés pour traquer les passeurs, mais les migrants ont pu prendre par centaines des trains à Budapest dans l'espoir de gagner l'Allemagne.

Les pays européens, appelés par Bruxelles au respect de leurs «valeurs d'humanité», affichaient dans le même temps leurs divisions sur la gestion de la crise des migrants et réfugiés qui affluent sur le continent. Cette crise est un défi pour les idéaux de l'Union européenne, a déclaré la chancelière allemande Angela Merkel.

Les personnes se rendant en voiture de Hongrie en Autriche devaient patienter lundi dans des bouchons de 50 kilomètres près de la frontière, l'Autriche ayant renforcé les contrôles frontaliers pour traquer les trafiquants de migrants.

Ces mesures ont été mises en place dimanche soir après qu'un camion abandonné eut été trouvé la semaine dernière dans l'État du Burgenland, près de la frontière avec la Hongrie, avec 71 cadavres en décomposition de migrants.

Dans le cadre de ces contrôles, effectués en étroite collaboration avec les autorités hongroises, slovaques et allemandes, la police arrêtait chaque camion, fourgon ou voiture, dans le but de mettre la main sur ces trafiquants.

Peu de temps après le début de ces contrôles, les policiers ont découvert 12 migrants - neuf adultes et trois enfants - entassés dans une fourgonnette portant une plaque d'immatriculation française.

De leur côté, les autorités hongroises ont laissé partir à bord de trains à destination de l'Autriche et de l'Allemagne plusieurs centaines de migrants qui avaient passé des jours dans des gares de Budapest transformées en camps de réfugiés improvisés.

La police hongroise avait jusqu'à présent empêché les migrants de partir, car ils n'avaient pas de documents officiels.

Selon un journaliste de l'AFP, les forces de sécurité n'étaient pas présentes lundi lorsque les migrants, dont de nombreux Syriens, se sont précipités pour monter à bord des trains réguliers à destination de Vienne, Munich et Berlin.

Cependant, un policier autrichien se trouvant à la gare a déclaré à l'AFP que les migrants seraient stoppés une fois entrés en Autriche et empêchés de poursuivre leur voyage faute des papiers nécessaires.

«C'est une crise d'ampleur mondiale qui réclame une réponse conjointe européenne (...) Il s'agit avant tout d'être fidèle à nos valeurs, des valeurs d'humanité», a déclaré le premier vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans.

«Nous ne refoulerons jamais ceux qui ont besoin de protection (...) Les chiffres d'arrivées sont importants, il s'agit d'une crise mondiale, mais les chiffres sont tout à fait gérables pour un ensemble de 500 millions d'habitants», a-t-il défendu lors d'une visite à Calais (nord de la France).

À ses côtés, le premier ministre français Manuel Valls a souligné le «défi posé» à «chacun des pays de l'Union européenne», qui met leurs «sociétés à l'épreuve».

Dans l'un des lieux emblématiques de la crise migratoire, d'où des milliers d'étrangers cherchent à gagner l'Angleterre, les deux hommes sont allés à la rencontre de migrants et réfugiés, en compagnie du commissaire chargé des questions migratoires, Dimitris Avramopoulos.

La crise fait tanguer les relations entre Européens.

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Les personnes se rendant en voiture de Hongrie en Autriche devaient patienter lundi dans des bouchons de 50 kilomètres près de la frontière, l'Autriche ayant renforcé les contrôles frontaliers pour traquer les trafiquants de migrants.

La ministre autrichienne de l'Intérieur, Johanna Mikl-Leitner, a plaidé lundi pour une «réduction», voire une «suppression» des aides financières versées par Bruxelles aux pays de l'UE qui renâclent à accueillir plus de réfugiés.

«De trop nombreux pays se refusent à prendre leur part», a aussi regretté Manuel Valls. «Toute l'Europe est concernée par cette crise d'une exceptionnelle gravité, elle doit donc se mobiliser», a-t-il ajouté.

«Les droits civils universels ont été jusqu'à présent étroitement liés à l'Europe et à son histoire, en tant que principe fondateur de l'Union européenne. Si l'Europe échoue sur la crise des réfugiés, ce lien avec les droits civils universels sera cassé», a estimé de son côté Mme Merkel lors d'une conférence de presse.

La Commission européenne souhaite répartir les demandeurs d'asile dans les pays européens pour soulager les pays d'arrivée. Cette répartition sur la base du volontariat se heurte toutefois au manque de volonté de certains pays, dont la Hongrie, l'Autriche, la Slovaquie et la Slovénie.

Et dans son édition de lundi, le quotidien populaire allemand Bild, qui a entamé une campagne en faveur des demandeurs d'asile, épingle la France, la Grande-Bretagne, l'Italie, la Lituanie et la Slovénie, coupables selon le journal, de ne pas accueillir autant de réfugiés qu'ils le pourraient.

Dimanche, citant la Hongrie, le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, avait jugé «scandaleuse» l'attitude de certains pays européens et appelé au démantèlement des barrières en construction entre pays membres de l'UE.

Ces critiques sont «choquantes», a réagi le ministre hongrois des Affaires étrangères Peter Szijjarto qui a convoqué lundi l'ambassadeur de France à Budapest.

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Des migrants attendent de monter à bord de l'autobus qui doit les mener vers un camp de réfugiés, après être entrés en Hongrie via la Serbie, le 31 août.