Le président palestinien Mahmoud Abbas, auréolé de sa victoire diplomatique à New York, a affirmé dimanche à Ramallah que les Palestiniens avaient maintenant «un État» à son retour de l'ONU où la Palestine a obtenu le statut d'État observateur.

À New York, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a affirmé que le projet de nouvelles constructions dans les colonies israéliennes, annoncées en représailles à la décision de l'ONU, porterait un «coup presque fatal» au processus de paix israélo-palestinien.

«Les colonisations sont illégales au regard du droit international et si (ce projet) venait à se concrétiser, cela porterait un coup presque fatal aux dernières chances de garantir une solution à deux États», a rappelé M. Ban dans un communiqué.

Israël a annoncé vendredi son intention de construire 3.000 logements en Cisjordanie et à Jérusalem-est, au lendemain du vote à l'Assemblée générale de l'ONU accordant à la Palestine un statut d'État observateur non membre.

Dimanche, Israël a aussi annoncé le blocage temporaire du transfert à l'Autorité palestinienne, initialement prévu début décembre, de 460 millions de shekels (environ 92 millions d'euros) de taxes collectées par l'État hébreu.

À Ramallah (Cisjordanie), siège de l'Autorité palestinienne, plusieurs milliers de Palestiniens sont venus dimanche accueillir M. Abbas, trois jours après le vote historique à New York.

«Maintenant, nous avons un État. La Palestine a obtenu un succès historique aux Nations unies», s'est félicité le président palestinien, en s'engageant à relancer la réconciliation interpalestinienne.

«Le monde l'a dit haut et fort: Oui à l'État de Palestine, oui à la liberté de la Palestine, oui à l'indépendance de la Palestine. Non à l'agression (israélienne), non aux colonies, non à l'occupation», a lancé M. Abbas devant une foule de partisans réunis à la Mouqataa, le complexe de la présidence palestinienne, selon un journaliste de l'AFP.

Le nouveau statut de la Palestine aux Nations unies n'est pas celui d'un État à part entière, mais donne accès aux Palestiniens à des agences de l'ONU et à des traités internationaux.

Vers la réconciliation?

M. Abbas a aussi promis à la foule que sa «tâche prioritaire» dans les prochains jours serait d'«examiner les mesures nécessaires pour parvenir à la réconciliation» interpalestinienne.

Les responsables palestiniens estiment que le nouveau statut de la Palestine à l'ONU est un encouragement à une réconciliation entre le parti nationaliste Fatah de M. Abbas et le Hamas islamiste, au pouvoir à Gaza, sans laquelle ce succès n'a aucune chance de déboucher sur un État à part entière.

À Gaza, le porte-parole du Hamas, Sami Abou Zouhri, a affirmé que le mouvement islamiste «était intéressé à parvenir à la réconciliation palestinienne». Un autre responsable du Hamas a appelé à «des réunions urgentes» pour aboutir à la réconciliation.

Le président palestinien a en outre réaffirmé que Jérusalem était, «à jamais, la capitale de l'État de Palestine», en écho aux déclarations répétées du premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou faisant de Jérusalem «la capitale indivisible et éternelle d'Israël».

Mais M. Abbas n'a pas directement abordé les mesures de rétorsion annoncées par Israël.

Dimanche, le ministre israélien des Finances, Youval Steinitz, a expliqué le blocage du transfert des taxes: «Nous avons dit dès le début que le rehaussement du statut de la Palestine à l'ONU ne se produirait pas sans réaction de la part d'Israël», selon des propos rapportés par la radio publique.

Et M. Nétanyahou a réaffirmé dimanche l'intention de son gouvernement de construire 3000 logements supplémentaires en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est annexée, en représailles à l'initiative palestinienne à l'ONU.

L'annonce de ces nouvelles constructions a été vivement condamnée par la communauté internationale, y compris par les États-Unis, alliés stratégiques d'Israël. Les médias israéliens voyaient d'ailleurs dimanche dans l'annonce de M. Nétanyahou une «gifle» à l'égard de Washington.

Israël bloque l'argent dû aux Palestiniens

De son côté, le gouvernement israélien a annoncé aujourd'hui qu'il bloquait le transfert des taxes collectées par Israël au profit de l'Autorité palestinienne à la suite de l'octroi du statut d'État observateur à l'ONU à la Palestine.

Le ministre des Finances Youval Steinitz a annoncé, au début du conseil des ministres hebdomadaire, que 460 millions de shekels (environ 120 millions $) qui devaient être transférés ce mois-ci seraient bloqués, ont précisé les médias israéliens.

«Nous avons dit dès le début que le rehaussement du statut de la Palestine à l'ONU ne se produirait pas sans réaction de la part d'Israël», a déclaré M. Steinitz, dans des propos rapportés par la radio publique.

«Je n'ai pas l'intention de transférer les taxes dues à l'Autorité palestinienne ce mois-ci. Elles seront utilisées pour rembourser les dettes dues par l'Autorité palestinienne à la compagnie nationale d'électricité israélienne», a-t-il ajouté.

Israël poursuit la colonisation

Par ailleurs, le premier ministre Benyamin Nétanyahou a confirmé l'intention du gouvernement de construire 3000 logements supplémentaires en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est annexée en représailles à la démarche palestinienne à l'ONU.

«La réponse à l'attaque contre le sionisme et contre l'État d'Israël doit nous conduire à augmenter et accélérer la mise en oeuvre des plans de construction dans toutes les zones où le gouvernement a décidé de bâtir», a affirmé M. Nétanyahou en ouvrant le conseil des ministres.

«Aujourd'hui, nous bâtissons et nous continuerons de bâtir à Jérusalem et dans tous les lieux qui sont inscrits sur la carte des intérêts stratégiques de l'État d'Israël», a-t-il souligné.

Les constructions prévues concernent notamment la zone E1, particulièrement controversée, entre Jérusalem et la colonie de Maalé Adoumim, où Israël s'était engagé à ne pas bâtir auprès des États-Unis.

Le projet de rattachement de Maalé Adoumim aux quartiers de colonisation de Jérusalem-Est compromet la viabilité d'un futur État palestinien en coupant la Cisjordanie en deux.

L'annonce des constructions, en particulier dans la zone E1, a suscité une vague de critiques dans la presse israélienne dimanche, de nombreux commentateurs soulignant qu'elle constituait une «gifle» à l'égard de Washington.

Israël viole un engagement auprès de Washington

«Ce qui est particulièrement surprenant c'est la violation par Israël de son engagement auprès des États-Unis de ne pas construire dans la zone E1, sachant qu'une telle construction empêcherait l'établissement d'un État palestinien en Cisjordanie. Après que les États-Unis ont été pratiquement les seuls à défendre la cause d'Israël aux Nations unies, Israël les récompense avec une retentissante claque dans la figure», peut-on lire dans le quotidien Haaretz (gauche).

Même le quotidien Maariv, marqué à droite, prend ses distances avec la décision gouvernementale.

«Jeudi dernier, Abou Mazen (le surnom de Mahmoud Abbas) a prononcé un discours de haine qui constituait une claque dans la figure de tous ceux qui l'avaient soutenu», souligne son éditorialiste Ben-Dror Yemini.

Et d'ajouter: «Maintenant le gouvernement israélien a retourné la situation avec sa décision de construire des milliers de logements dans une zone extrêmement controversée afin de montrer au monde que ce n'est pas Abou Mazen qui lui crache à la figure, mais Israël».