Le gouvernement prolonge l'entente controversée qui permet aux chirurgiens de l'hôpital du Sacré-Coeur de Montréal d'opérer des patients, aux frais de l'État, à la clinique privée Rockland MD.

Au lieu du sempiternel débat entre le public et le privé, c'est l'intérêt des patients qui devrait guider les décisions. L'histoire montre que ce ne fut pas toujours le cas.

Les hôpitaux doivent fréquemment annuler des opérations, souvent des chirurgies d'un jour, pour faire place à des cas plus urgents. Le partenariat entre l'hôpital du Sacré-Coeur et la clinique privée Rockland MD devait donc permettre d'opérer plus rapidement les cas mineurs et éventuellement, il devait être étendu à d'autres établissements.

L'entente, souvent critiquée, devait prendre fin en septembre 2014, mais a été prolongée. Elle vient d'obtenir un autre sursis jusqu'en octobre, le temps d'évaluer si le public peut répondre aux besoins.

Cette évaluation est indispensable. La clinique privée est certes attrayante pour les chirurgiens de Sacré-Coeur, mais il faut déterminer s'il est possible de pratiquer ces interventions ailleurs, et à quel coût. Les études se contredisent, mais un récent rapport commandé par le ministère de la Santé conclut que les coûts sont comparables entre le privé et le public.

En fait, le rapport révèle surtout que des « anomalies » ont fait grimper la facture. L'hôpital du Sacré-Coeur a déboursé de 12 000 à 15 000 $ en trop parce qu'il a délégué l'achat de fournitures à Rockland, qui lui a imposé une surcharge de 15 %.

Des « privilèges temporaires » ont été octroyés à certains médecins et la clinique privée a versé une prime quotidienne de 1000 $ aux anesthésiologistes, remboursée par l'hôpital, démontrent aussi les documents préparés pour l'étude des crédits du Ministère.

On sait aussi que Québec a tenté de rapatrier les chirurgies bariatriques de Rockland à l'hôpital de Lachine, mais que les chirurgiens de Sacré-Coeur ont refusé d'y travailler.

Une plus grande efficience dans les blocs opératoires, combinée à une meilleure collaboration entre les hôpitaux et entre les chirurgiens, contribuerait certainement à faire en sorte que des patients soient opérés plus rapidement dans le réseau public.

C'est d'ailleurs l'un des objectifs poursuivis par la critiquée réforme du réseau de la santé. Les hôpitaux Sacré-Coeur, Fleury et Jean-Talon sont désormais réunis au sein d'une seule organisation (Centre intégré universitaire de santé et services sociaux du Nord-de-l'Île-de-Montréal), ce qui, espère-t-on, facilitera les échanges.

Il faut aussi une liste d'attente centralisée et accessible pour les patients en attente d'une opération, une promesse de longue date restée lettre morte à ce jour.

Si le réseau public ne suffit pas à la demande, le recours à une clinique privée comme Rockland MD, à un coût avantageux, s'avère une solution complémentaire intéressante. Mais ce doit être fait dans l'intérêt de tous les patients, pas seulement celui des médecins.