Alors qu'Alex Gibney analysait des images de Lance Armstrong, niant puis confirmant avoir utilisé des produits dopants, le cinéaste a réalisé qu'il avait affaire à un grand maître de la supercherie.

Cette série de mensonges et de fausses histoires est expliquée dans le documentaire de Gibney, The Armstrong Lie, dans lequel le réalisateur oscarisé cherche à savoir jusqu'où l'ancien athlète ira pour protéger l'image de lui-même qu'il a créée, non seulement en tant que vedette du sport, mais aussi en tant que symbole d'espoir.

Le documentaire prendra l'affiche vendredi à Montréal, Toronto et Vancouver avant d'être présenté ailleurs au pays.

En créant son film, Gibney a réalisé que même après qu'Armstrong eut admis avoir dit des milliers de faussetés, l'athlète ayant vaincu le cancer avant de devenir champion a cherché à fabriquer sa propre histoire pour se mettre en valeur.

En entrevue au dernier Festival du film de Toronto, Gibney a expliqué qu'Armstrong «essaie très fort de prouver à tout le monde qu'il doit encore être considéré comme un grand athlète».

Selon le cinéaste, ce qui est encore plus grave, c'est qu'il y a eu «bris de confiance».

«Il a pris des gens qui avaient beaucoup d'espoir - son histoire est devenue symbole d'espoir pour les survivants du cancer aux quatre coins de la planète - et il les a rendus complices de son mensonge, a avancé Alex Gibney. Et si l'on ajoute le fait qu'il a attaqué des gens qui essayaient de dire la vérité, ces deux choses ont fait beaucoup plus de tort à son histoire et à son mythe que le dopage.»

Le documentaire de Gibney devait à l'origine s'intituler The Road Back et suivre le gagnant de sept Tours de France alors qu'il planifiait son retour à la compétition en 2009. Le projet avait été mis de côté lorsque le cycliste a dû se défendre contre des soupçons de dopage accompagnés de preuves de plus en plus accablantes et d'une enquête criminelle aux États-Unis.

Lorsqu'Armstrong a finalement admis, à la télévision, qu'il s'était dopé pendant plusieurs années, Gibney a décidé de retourner à son projet, juxtaposant les images de l'athlète niant s'être dopé à celles de ses aveux de culpabilité.

«Lui et moi avons eu des conversations, et ces conversations ont dû être très honnêtes parce qu'elles devaient tenir compte du fait qu'il m'avait menti dans le passé, a-t-il expliqué. Il rationalisait son comportement et je devais le relancer sur cette rationalisation.»

Armstrong a été banni à vie du cyclisme professionnel et ses titres du Tour de France lui ont été retirés après qu'il eut confié à Oprah Winfrey, en janvier, avoir utilisé des produits dopants pour remporter la difficile course.

Bien que le documentaire de Gibney montre des images d'Armstrong captées immédiatement après cette entrevue et qu'il présente une entrevue tournée plus tard, il permet également aux spectateurs d'être témoins de l'énorme pression reposant sur les épaules des cyclistes professionnels.

«Il y a plusieurs nuances de gris, a précisé le cinéaste. Et je crois que lorsque l'on commence à parler de dopage, on ne peut en parler hors contexte. Il n'y a aucun doute que Lance se dopait à une époque où plusieurs des autres grands cyclistes le faisaient aussi. Mais en même temps, comme le dit un intervenant dans le film, cela ne signifie pas que ce n'était pas contraire aux règles.»