Après La fille du puisatier, l'acteur français Daniel Auteuil a de nouveau choisi Marcel Pagnol pour adapter au cinéma sa célèbre trilogie marseillaise, oeuvre qui l'a séduit parce qu'elle mêle la tragédie et l'humour, comme il l'a expliqué dans un entretien à l'AFP.

Marius et Fanny, les deux premiers volets de la trilogie, sortent en France le 10 juillet. César, dont l'action se situe vingt ans plus tard, sera dans les salles en décembre.

Pourquoi encore Pagnol? «Je suis né méridional. Déjà quand je suis né, Pagnol avait donné une identité à la Provence», explique l'acteur né à Alger qui a grandi à Avignon, dans le sud de la France. «Quand vous arrivez à 20 ans à Paris et que la lumière vous manque, vous la retrouvez avec Pagnol et Giono».

Avec la trentaine est venue la reconnaissance de ses pairs grâce à Pagnol et Jean de Florette qui lui vaudra le César du meilleur acteur en 1987.

«Alors quand la question s'est posée de mettre en scène, cela passait obligatoirement par Pagnol. J'ai découvert que c'était un auteur majeur et que ce qu'il nous racontait était toujours d'actualité, des histoires universelles et intemporelles», raconte le récent juré du Festival de Cannes.

Pagnol c'est «la tragédie et la comédie en même temps, c'est cela qui m'intéressait. On croit qu'on rigole (avec Pagnol), mais il dit des choses terribles».

La trilogie marseillaise se déroule en grande partie dans le Bar de la marine tenu dans les années 30 par César, campé par Daniel Auteuil. Marius (Raphaël Personnaz) rêve d'embarquer sur un des bateaux ancrés devant au grand dam de Fanny (Victoire Belezy), la petite marchande de coquillages amoureuse de lui depuis l'enfance.

Sacrifice

La veille du départ de Marius, ils s'avoueront leur amour. Elle se donne à lui, mais le laisse partir. Enceinte, sa mère et César la pousseront à épouser Panisse, un vieux commerçant prospère, pour éviter le déshonneur.

Cela raconte «des destins ratés, des tragédies, des gens qui s'aiment et ne se trouvent pas», poursuit le cinéaste.

Ce sont aussi des rapports entre parents et enfants compliqués au Bar de la marine entre l'absence de mère et la volonté de Marius de se réaliser contre l'avis du père quitte à se tromper.

«Fanny, c'est compliqué (...) Elle ne peut se satisfaire d'un bonheur en demi-teinte. Elle préfère laisser partir (Marius). C'est son premier sacrifice», dit Daniel Auteuil.

Peu d'adaptations ont été faites depuis celles de Pagnol sur les planches ou sur grand écran incarnées entre 1931 et 1936 par Raimu dans le rôle de César, Pierre Fresnay dans celui de Marius et Orane Demazis dans celui de Fanny.

Comment s'y attaquer aujourd'hui? Daniel Auteuil n'a oublié ni l'accent du sud, ni la belle lumière bleue ou les décors qui respirent le Marseille d'antan. Il n'a pas oublié non plus la fameuse partie de cartes.

«C'est une très bonne histoire et comme beaucoup de metteurs en scène qui passent leur temps à revisiter Marivaux ou Molière, je pouvais moi aussi montrer des choses qui n'avaient pas été déjà montrées».

«Même si rester c'est être malheureux, et partir c'est rendre les autres malheureux, je dis à un jeune d'aujourd'hui qu'à une époque où on est en manque de désir, "essaie de vivre ta vie avec le plus d'intensité possible et c'est tout"».