Alice, nom de scène d'Ariane Bisson McLernon, a lancé vendredi dernier son deuxième album. Réalisé par Étienne Dupuis-Cloutier, enregistré avec des musiciens montréalais bien en vue, Climbing Away résulte du deuil créatif d'une peine d'amour durement insoupçonnée.

Elle venait d'obtenir une bourse du Conseil des arts pour son deuxième album quand son couple a éclaté et que sa vie a basculé. De sa douleur sont nées des compositions et le projet de son deuxième album est devenu sa raison d'exister. «Mon bébé», raconte-t-elle.

Alice a écourté le nom de scène de ses débuts, Alice and the Intellects. Pourquoi Alice au lieu de son prénom de naissance, Ariane? Pour séparer son travail de musicienne de sa carrière d'actrice, notamment dans plusieurs productions de théâtre jeunesse.

«La musique est mon bébé zéro compromis», explique l'auteure-compositrice formée au collège Lionel-Groulx en théâtre musical. «J'aime dans ma carrière être au service de quelque chose et d'une autre vision artistique, mais Alice me permet de me dissocier de l'image de la comédienne qui fait un album. Je ne veux pas que mon projet soit trop théâtral. Ma musique est très personnelle.»

Alice a enregistré Climbing Away à la fin de 2013. Sa sortie a été reportée par l'écriture de deux productions destinées à la Maison théâtre. «Un music-hall pour ados, Le chant du koï, qui sera présenté en février, et une coproduction avec la France que nous avons créée à Marseille au printemps dernier, Lettre pour Éléna, qui sera présentée en octobre.»

Tête première

La jeune femme gère son horaire et sa carrière. Fonceuse, elle a orchestré chaque étape de production de son album, du choix de ses collaborateurs (dont son fidèle guitariste Stéphane Leclerc) au mixage en passant par la conception de la pochette (signée par la Coop Sésames).

Alice a pris contact avec des musiciens de la trempe du batteur Josée Major et de Mishka Stein, bassiste de Patrick Watson. Elle a dû les convaincre de l'accompagner en studio, mais aussi d'enregistrer ses chansons en prises intégrales et non par segments.

«Après [l'enregistrement], ils m'ont tous dit: "Fille, tu m'as fait suer." De bons joueurs comme eux sont aussi de grands perfectionnistes. Des prises intégrales sont donc très prenantes en studio.»

La brunette chante en duo avec Jérôme Minière une version minimaliste, traduite et méconnaissable d'Are You Lonesome Tonight. Elle collabore avec Minière régulièrement depuis une suite de rencontres anonymes sur la mythique Plaza St-Hubert. «Nous nous croisions toujours au bureau de poste et, chaque fois, je me demandais si je devais lui donner un album... Mais la troisième fois, je l'ai joint sur Facebook», raconte-t-elle.

Minière a eu un coup de coeur pour la voix d'Ariane, qu'il a réquisitionnée pour plusieurs spectacles et ses deux derniers albums. «Nous sommes un bon match!», dit sa collaboratrice.

Sur les deux derniers titres de Climbing Away, on peut également entendre la touche sonore du claviériste Christophe Lamarche-Ledoux, membre des groupes Organ Mood et Rock Forest, et collaborateur de Jimmy Hunt.

C'est par une heureuse malchance (remplacement de dernière minute causée par une hernie discale) qu'Alice a retrouvé le réalisateur Étienne Dupuis-Cloutier (Sherbrookois de naissance comme elle). «Il était déjà à l'horaire pour du clavier. Dans le fond, c'est un plan qui me ressemble, dit Alice. Précipité, dernière minute, avec tout le monde sur l'adrénaline.»

Alice dit avoir tout appris d'Étienne Dupuis-Cloutier en enregistrant son premier album, Balloon Ride. Mais cette fois-ci, c'est elle qui a établi «le plan de match» et assuré seule la préproduction. «Étienne est tout un chef. Sa plus grande qualité est de faire sortir la meilleure performance de chacun.»

«Quand cela respire»

L'enregistrement de Climbing Away s'est fait intensément en quelques jours à peine au studio Planète.

«Toutes les chansons ont été enregistrées "live". Cela ne fait pas des chansons parfaites. C'est ce que je voulais.»

Son intime et crépitant, facture cabaret, rythme langoureux, Climbing Away propose une pop de chambre de l'école de Feist et de Cat Power. «J'aime quand il y a de l'air. La batterie minimaliste, quand cela respire. J'ai écouté beaucoup de soul des années 70», raconte Ariane Bisson McClernon.

Encore une fois, ce sont ses maquettes et un courriel sympathique d'Alice qui ont convaincu Mark Lawson d'assurer le mixage (Arcade Fire ne jure notamment que par lui). «Mon mixeur préféré à vie. Je l'admire depuis ce qu'il a fait avec The Unicorns.»

Alice doit maintenant bâtir une tournée et préparer la sortie de son deuxième clip, aussi réalisé par Anh Minh Truong. Elle pense même aller faire un saut en Europe avec sa musique.

Le coeur lui en dit, et il va mieux.

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