Sur les écrans depuis le 1er mars, La légende de Sarila est le premier long métrage d'animation québécois en stéréoscopie (3D). La réalisatrice Nancy Florence Savard a porté ce projet à bout de bras pendant près de 12 ans, invitant au passage dans l'aventure Marie-Claude Beauchamp. Avec leur film, les deux productrices ont réussi à mettre le pied dans la cour de géants de l'animation tels que Pixar et Walt Disney. La Presse et Radio-Canada les nomment Personnalités de la semaine.

Jointes par téléphone à Lyon, Nancy Florence Savard et Marie-Claude Beauchamp sirotaient un verre sur une terrasse. Un rare moment de répit dans un horaire chargé. Elles séjournent dans la ville française afin de vendre La légende de Sarila, le premier film d'animation 3D entièrement québécois. Les deux productrices arrivent tout juste de Berlin, et la prochaine étape sera Cannes. «Le blitz de vente se poursuivra jusqu'à l'automne prochain», souligne Marie-Claude Beauchamp.

L'oeuvre, dont le scénario est signé Pierre Tremblay et Roger Harvey, a déjà été vendue dans une vingtaine de pays, notamment en Allemagne et en Russie. La majorité des acheteurs comptent bien lancer le film québécois au début de l'hiver prochain.

La légende de Sarila raconte le voyage initiatique de trois jeunes Inuits partant à la recherche d'une terre promise. Le film, destiné à un jeune auditoire, a mis près de 12 ans à voir le jour. «J'ai lu, pour la première fois, un résumé de l'histoire en mars 2001. À l'époque, le projet faisait une vingtaine de pages», se souvient Nancy Florence Savard, réalisatrice et productrice.

En embarquant dans l'aventure, elle savait très bien que la route serait longue. Sa jeune boîte, Productions 10e avenue, n'avait alors qu'un court métrage d'animation sur sa feuille de route. «Il fallait avoir du courage, de la patience, un peu d'illusions et beaucoup d'espoir pour plonger immédiatement dans ce projet.»

Nancy Florence Savard n'est pas une novice pour autant. Ses débuts professionnels ont coïncidé avec la création de MusiquePlus. Elle a par la suite cumulé les contrats à Radio-Canada, Astral et TVA. Passionnée d'animation, elle est revenue s'installer dans sa région natale, Québec, pour travailler en publicité et fonder sa propre boîte. Très attachée à sa ville, la réalisatrice et productrice fait maintenant rayonner les talents d'ici dans ses productions de calibre international.

«Je dirais plutôt que j'ai un attachement pour tout le Québec en entier. On a un bassin de talents incroyable ici. Il est important que mes projets mettent de l'avant les artisans locaux. Et la beauté de l'animation, c'est qu'elle requiert plus de temps qu'une fiction. Nos artistes travaillent donc plus longtemps.»

Par exemple, La légende de Sarila a fait travailler, pendant presque deux ans, les spécialistes de ModusFX, studio situé en banlieue de Montréal.

Malgré la somme de travail titanesque, le film a été réalisé avec un budget de près de 8,5 millions. On est très loin des films d'animation hollywoodiens qui frisent parfois les 200 millions. C'est en 2007 que Marie-Claude Beauchamp est venue se greffer à l'équipe de Sarila, afin justement d'aider à boucler le financement.

Productrice chez CarpeDiem, elle est aussi présidente d'Alliance Québec Animation, regroupement d'une quarantaine de studios et de producteurs québécois. Elle a travaillé comme distributrice avant de se diriger vers la production. Un virage qui s'est fait tout naturellement, il y a près de 20 ans.

Marie-Claude Beauchamp a produit plus de 500 épisodes totalisant 200 heures de programmation. Passionnée par son métier, elle pilotera d'ailleurs, le 24 avril prochain, des états généraux sur l'industrie de l'animation. «Cet événement sera l'occasion de faire le point. L'industrie de l'animation est en perte de vitesse au Québec. Il faut qu'on lui donne les moyens de reprendre la place qu'elle mérite», souligne-t-elle.

Malgré un horaire bien rempli, les deux productrices planchent, à distance, sur leurs prochains projets respectifs. Nancy Florence Savard met la touche finale au Coq de Saint-Victor, film d'animation entièrement réalisé à Québec. Et Marie-Claude Beauchamp travaille sur la version animée 3D du classique jeunesse La Guerre des tuques.