Une femme soupçonnée d'avoir pris le contrôle de la vie et des biens d'une dame de 90 ans comparaîtra en juillet à Montréal pour répondre de 16 accusations criminelles.

Anita Obodzinski, 51 ans, qui prétendait être la nièce de la vieille dame, sera accusée notamment d'enlèvement, séquestration, voie de fait causant des lésions, introduction par effraction, vol, fraude de plus de 5000 $, faux documents, entrave à la justice...

Son conjoint, Arthur Trzciakowski, 48 ans, ainsi qu'une travailleuse sociale, Alissa Kerner, 42 ans, font face à certaines des accusations conjointement avec Mme Obodzinski.

Les faits reprochés se seraient produits entre mars 2013 et mai 2014. La victime alléguée est Veronika Kalimbet Piela. Notre chroniqueur Yves Boisvert a raconté l'étonnante histoire de cette nonagénaire en avril dernier, sous le titre : « La vieille dame qui s'enfuyait avec sa marchette. »

Contre son gré

En résumé, par des subterfuges allégués, Mme Piela aurait été déclarée inapte en décembre 2013 alors qu'elle ne l'était pas. Mme Obodzinski, qui était sa mandataire, obtenait alors les pleins pouvoirs. Un rapport psychosocial, préparé par la travailleuse sociale Kerner, établissait que Mme Piela était « incapable de s'exprimer, car sa mémoire, sa lucidité et son jugement [étaient] gravement altérés ».

Le 12 février 2014, on forçait la dame à partir de chez elle et on la plaçait dans une résidence pour personnes âgées. À cet endroit, on lui interdisait de téléphoner et de recevoir de la visite, sous prétexte de la protéger contre elle-même, notamment parce qu'elle risquait de dilapider son argent en le donnant à un prêtre ukrainien. En fait, son argent, environ 500 000 $, avait été transféré à son insu dans le compte en fiducie d'un avocat à la demande de la « nièce. » L'avocat est le conjoint de Mme Kerner.

Fuite

Quoi qu'il en soit, trois jours plus tard, le matin, Mme Piela a réussi à s'enfuir de la résidence avec son déambulateur, sans manteau.

Des policiers l'ont recueillie et c'est alors qu'elle a déclaré qu'elle songeait à se suicider si elle devait rester à la résidence.

Les policiers avaient déjà eu à intervenir auprès de Mme Piela, et des aspects de son histoire les intriguaient.

Ils l'ont quand même ramenée à la résidence, mais sont retournés la chercher deux jours plus tard avec des intervenants du CLSC afin de l'amener dans un refuge. Mme Piela vit aujourd'hui dans une résidence de son choix. Une partie de son argent a disparu.

Enquête

L'enquête policière a finalement abouti récemment, avec le dépôt des accusations.

Rappelons que Mme Kerner est radiée provisoirement de son ordre professionnel depuis septembre dernier en raison de son intervention. Elle fait face à onze infractions déontologiques, mais n'a pas encore été jugée.

Dans le dossier criminel, Mme Kerner est accusée conjointement avec les deux autres accusés d'avoir pénétré par effraction chez la victime le 2 février 2014, d'avoir commis un méfait en brisant la porte, d'avoir séquestré Mme Piela, d'avoir volé des documents et obtenu des renseignements qui pouvaient servir à commettre une fraude.

- Avec la collaboration d'Yves Boisvert, La Presse