Le ministère de l'Éducation a semé la perplexité, la semaine dernière, en invitant les commissions scolaires «à la prudence» quand elles utilisent le «sac à dos» des élèves pour envoyer des messages à leurs parents.

Dans une lettre datée du 1er octobre, transmise aux directeurs généraux, Yves Sylvain, sous-ministre adjoint, a insisté sur des passages de la Loi sur l'instruction publique qui exigent des commissaires scolaires «honnêteté» et «loyauté».

Le ministère s'interroge ainsi sur la possibilité que les coordonnées des parents soient utilisées en contravention avec la loi pour qu'ils prennent position dans un débat, auquel M. Sylvain fait référence à mots couverts.

Le sous-ministre se limite à évoquer «une communication pouvant être perçue comme les invitant à adhérer à une position et à agir afin de faire valoir celle-ci», indique la lettre transmise à La Presse Canadienne.

«Nous vous invitons à la prudence et vous demandons de veiller à ce que les membres du conseil de votre commission scolaire se conforment à leurs obligations dans les communications faites aux parents, que celles-ci soient faites par courriel, par l'intermédiaire du sac à dos des enfants ou de toute autre manière», a écrit le sous-ministre.

Selon une source du secteur des commissions scolaires qui a requis l'anonymat, le manque de clarté de la lettre de M. Sylvain a suscité plusieurs interrogations dans les administrations qui l'ont reçue.

Bien qu'elle ait été envoyée au moment où les parents faisaient des chaînes humaines autour des écoles afin de protester contre les compressions en éducation, le sujet auquel M. Sylvain réfère serait le projet d'abolition des élections scolaires et les réformes souhaitées par le gouvernement, a indiqué cette source.

«Ce ne serait pas en lien avec les événements du 30 septembre ou du 1er octobre, mais plus tôt, à la rentrée scolaire, dans la mouvance du projet de loi qui doit être déposé, a-t-elle dit. Certains présidents de commissions scolaires ont fait comme d'habitude des messages pour la rentrée, mais pour certains c'était sur le projet de loi sur la gouvernance, sur l'importance de la démocratie.»

Le ministre de l'Éducation, François Blais, s'est engagé à déposer cet automne un projet de loi qui doit mettre fin aux élections scolaires, réformer la taxe scolaire et en finir avec les postes de commissaires.

Mardi, le ministère de l'Éducation n'a pas précisé à quel débat M. Sylvain faisait référence dans sa lettre.

Une porte-parole a affirmé que son intervention a été décidée à la suite de plaintes de parents et de représentations de la Fédération des comités de parents concernant l'utilisation de leurs coordonnées pour des communications qui n'avaient pas de lien direct avec l'organisation des commissions scolaires ou des écoles.

«Le ministère voulait rappeler aux commissions scolaires qu'elles ne doivent transmettre aux parents d'élèves que les informations pertinentes prévues par la Loi sur l'instruction publique», a déclaré Esther Chouinard dans un courriel.

Dans sa lettre, M. Sylvain, sous-ministre adjoint à l'éducation préscolaire et à l'enseignement primaire et secondaire, affirme que les commissions scolaires doivent demeurer prudentes après avoir été invitées à tenter de rallier les parents à leurs prises de position.

«Selon les informations portées à notre connaissance, une telle communication s'éloignerait significativement du type de communications auxquelles les parents sont habituellement en droit de s'attendre de leur commission scolaire», a-t-il écrit.

M. Sylvain a rappelé aux directeurs généraux que la Loi sur l'instruction publique limite les fonctions et pouvoirs des commissaires scolaires afin qu'ils agissent «avec soin, prudence et diligence, avec honnêteté, loyauté et dans l'intérêt de la commission scolaire et de la population qu'elle dessert».

«Considérant ce qui précède, le ministère questionne sérieusement la légitimité de l'utilisation des coordonnées des parents pour leur transmettre des communications de la nature de celles mentionnées précédemment, à notre avis, lesquelles ne s'inscrivent pas dans l'esprit des devoirs et responsabilités des commissions scolaires», a-t-il écrit.

En plus de ne pas exposer clairement le sujet évoqué, le fait que ce soit le sous-ministre qui intervienne sur un sujet politique étonne également, a indiqué la source du secteur des commissions scolaires.

«C'est le bureau du sous-ministre qui écrit aux directeurs généraux plutôt que le ministre aux présidents, a-t-elle dit. Si on est sur le terrain politique pourquoi ce n'est pas le ministre?»