Des enseignants du secondaire accusent la Commission scolaire de Montréal de vouloir «faire des économies de bout de chandelle» sur le dos des élèves afin de régler son déficit.

Aux prises avec un déficit historique de 47,5 millions, la CSDM élabore des mesures pour espérer un retour à l'équilibre budgétaire. Les services aux élèves ne devaient pas être touchés.

C'est loin d'être le cas, dénoncent des enseignants d'une école secondaire d'un quartier défavorisé de Montréal, qui ont requis l'anonymat.

Le climat est morose en cette fin d'année scolaire. Les enseignants de l'école ont récemment appris que le nombre d'heures allouées aux enseignants-ressources, qui travaillent avec les élèves en difficulté, sera amputé de moitié. Les classes seront remplies au maximum. Alors qu'on comptait trois petits groupes totalisant 70 élèves en quatrième secondaire, il y en aura seulement deux, de 35 élèves chacun, l'automne prochain.

«Ce sont les élèves qui seront pénalisés»

Autour de la table d'un petit café, à un jet de pierres de leur école, ils sont sept enseignants réunis. Certains travaillent en adaptation scolaire, d'autres au régulier. La majorité cumule plus de 15 ans d'ancienneté au sein de l'école.

Ils vident leur sac, excédés par la situation. «Ce sont les élèves qui seront pénalisés», craignent-ils en affirmant que «les parents ont le droit de savoir ce qui se passe».

L'école est située dans un quartier difficile. Le taux de décrochage frôle 40%. Plusieurs parents choisissent d'inscrire leurs enfants au privé. Les décisions de la CSDM contribuent à «cet effritement du public», lance un enseignant.

À la prochaine rentrée scolaire, les prévisions indiquent une diminution de deux élèves au total dans l'école. Pourtant, trois postes d'enseignants viennent d'être supprimés.

Chacun devra en faire plus. Les périodes de travail des enseignants sont revues à la hausse. Pour compléter sa tâche, une enseignante en adaptation scolaire devra enseigner deux périodes d'anglais. «Je ne suis même pas bilingue», lance-t-elle.

Le petit groupe dénonce «l'approche comptable de la CSDM» qui ne tient pas compte de la réalité des milieux défavorisés et des besoins accrus des élèves. Ils ont besoin de davantage de support et d'aide de la part de leur enseignant.

«On a juste l'impression qu'il faut rentrer dans les petites cases du tableau», déplore un enseignant.

Sa collègue, qui enseigne les sciences, se demande comment elle pourra réaliser les projets qu'elle a faits cette année avec son groupe de 22 élèves si sa classe en compte plus de 30 l'automne prochain.

Cette tendance à «remplir» les classes au maximum alourdit la tâche des enseignants et ne favorise pas la réussite des élèves, corrobore le président de l'Alliance des professeurs, Alain Marois, questionné à ce sujet.

La tendance semble pourtant s'installer un peu partout sur le territoire de la CSDM, note-t-il. L'abolition de postes, souvent occupés par des enseignants d'expérience, nuit à la stabilité des équipes-écoles. «C'est important que les gens bougent le moins possible. Il faut conserver l'expertise dans les milieux», dit-il.

Optimiser les ressources

Le porte-parole de la CSDM, Alain Perron, explique pour sa part que les directions d'école ont reçu un mot d'ordre «de gérer de façon convenable».

«Chaque direction doit faire son travail pour resserrer les guides et optimiser les ressources.»

La méthode ne se veut pas dogmatique, ajoute-t-il. Les décisions sont prises au cas par cas, selon les besoins des écoles.

Quant aux suppressions de postes, des ajustements sont à venir en fonction du nombre d'inscriptions à la rentrée. «On préfère ouvrir des classes au besoin que de les fermer et de devoir payer des enseignants», dit M. Perron.