Robert Marcil, ex-directeur des travaux publics de Montréal, a reconnu devant la commission Charbonneau qu'il avait violé à maintes reprises le code de déontologie des ingénieurs alors qu'il était au service de la Ville de Montréal.

La Commission a fini d'entendre Robert Marcil cet après-midi au terme d'un interrogatoire particulièrement serré. Après trois jours passés à faire admettre au témoin ses nombreux égarements, le procureur Denis Gallant a énuméré un à un les articles du code de déontologie qu'il avait enfreints durant son mandat à la Ville. Le témoin a fini par reconnaître plusieurs manquements.



«Êtes-vous en train de nous dire que vous êtes imbécile et incompétent?», a lancé à un moment la juge France Charbonneau, impatiente, à l'ingénieur qui plaidait l'ignorance quant au système de collusion qui minait l'attribution des contrats à Montréal.



Après avoir reconnu qu'il avait transmis de l'information privilégiée à un entrepreneur, Robert Marcil a tout de même nié formellement avoir participé de plein gré au système de collusion et avoir été corrompu.



«Vous aviez les deux mains dedans. La collusion et la corruption étaient érigées en système. Vous êtes sous serment, admettez-le donc!», a lancé Me Gallant.



«Je n'étais pas au courant de ce système et je ne participais pas», a toutefois martelé Marcil.



Le témoin s'est plutôt défendu en disant qu'il avait pu être questionné à son insu sur les résultats des comités de sélection qui octroient les contrats aux firmes de génie, notamment par Bernard Trépanier, ex-responsable du financement d'Union Montréal. Le commissaire Lachance en a profité pour lui faire remarquer qu'il n'avait pas à parler des comités de sélection avec Trépanier, qui n'a jamais travaillé pour la Ville. Ses questions auraient dû aviver sa vigilance, estime le commissaire. «Si ç'a été le cas, je n'ai pas allumé», a simplement répondu Marcil.

C'est cette réponse qui a exaspéré la juge Charbonneau, qui lui a demandé s'il était «imbécile et incompétent». L'ex-cadre municipal a rétorqué qu'il n'était pas parfait, ce qu'a confirmé la présidente de la Commission.



La journée avait bien rudement commencé pour Robert Marcil, que le procureur Denis Gallant a poussé dans les câbles. Le procureur a placé Marcil devant les allégations de l'ingénieur Michel Lalonde, qui soutient qu'il a payé l'ex-cadre municipal pour qu'il truque les comités de sélection et facilite le partage des contrats entre firmes de génie. «Avez-vous reçu de l'argent?» a demandé Me Gallant. «Je n'ai absolument pas reçu d'argent. M. Lalonde ne dit pas la vérité», a maintenu Marcil.



Pourtant, l'ex-haut fonctionnaire a refusé de dire sous serment qu'il n'a jamais fourni de renseignements sur les comités de sélection. Il soutient qu'il ne s'en souvient pas.



Robert Marcil a accusé Lalonde d'avoir menti à la commission pour se venger de lui. Il croit que le président de Génius lui en veut d'avoir refusé son offre d'emploi, d'avoir débauché deux de ses employés et d'avoir obtenu des contrats dans son marché, sur la Rive-Nord. «Lalonde avait des raisons bien précises de m'en vouloir.»

Cette explication a surpris la juge Charbonneau, qui a demandé au témoin s'il ferait de même. «Vous auriez été prêt à mentir devant la Commission pour nuire à quelqu'un?», lui a-t-elle demandé. «Tout est possible», a répondu Marcil.



La question des comités de sélection de Montréal sera au coeur des audiences, les deux prochains témoins attendus étant Serge Pourreaux, directeur de l'approvisionnement de la Ville de Montréal de 2003 à 2006, et Claude Léger, directeur général de la Ville de Montréal de 2006 à 2009. Ce sont eux qui ont nommé Robert Marcil pour participer à 17 comités qui ont adjugé des contrats à des firmes de génie.