Dans une salle bondée, au premier jour de sa plaidoirie, la Couronne s'est servie des propres paroles de Guy Turcotte en lien avec la mise à mort de ses enfants, pour suggérer qu'il ne répond pas aux critères de l'article 16.

L'article 16 stipule qu'une personne ne peut être trouvée criminellement responsable si elle était incapable de juger de la nature et de la qualité de ses actes, ou de savoir qu'ils étaient mauvais au moment où elle les a commis. Or, a rappelé le procureur de la Couronne René Verret, M. Turcotte a lui-même dit qu'il s'était rendu compte qu'il faisait mal aux enfants quand il les a poignardés. 

En fait, M. Turcotte dit ne garder que des flashs des événements des 20 et 21 février 2009, au cours desquels il admet avoir tué ses enfants. L'un de ces flashs est qu'il se voit dans la chambre de son fils Olivier, en train de lui donner un coup de couteau. «Je réalise que je suis en train de lui faire mal. Je panique et je lui donne d'autres coups. Même affaire pour Anne-Sophie», avait relaté M. Turcotte lors de son témoignage.

Me Verret évalue que cela démontre que M. Turcotte était bien conscient de ce qu'il faisait. Il savait qu'il faisait mal à ses enfants, et il a continué quand même. Il a même entendu son fils cracher du sang, alors qu'il était dans la chambre de la petite.

Avant ou après

Au cours de sa plaidoirie, qui a duré quatre jours et demi, la défense a beaucoup insisté sur le fait que Guy Turcotte a consommé du méthanol avant de tuer ses enfants. La Couronne pense au contraire qu'il en a consommé «après» avoir tué les petits.

«Il y a des éléments de preuve sur le fait qu'il en a consommé après», a fait valoir Me Verret, qui dit vouloir s'attarder sur les éléments de preuve trouvés, et non ceux qui n'ont pas été trouvés, comme l'a soulevé la défense pour laisser planer un doute sur la qualité de l'enquête.

La consommation de méthanol est importante, a insisté Me Verret, parce que Guy Turcotte affirme que c'est lorsqu'il s'est vu mort (de toute évidence après avoir consommé du méthanol), qu'il a décidé d'amener les enfants avec lui. Ceci pour leur éviter de le trouver mort le lendemain. Avant, il avait oublié que les enfants étaient là. Me Verret trouve que cela n'est pas crédible. D'ailleurs, vers 20h30 ce fameux soir, M. Turcotte a appelé chez la gardienne qui devait les garder le lendemain, afin d'annuler. Il avait dit: «mes plans ont changé, je n'aurai plus besoin de vos services.»

La Couronne met aussi en doute le fait que M. Turcotte ne se rappelle plus de son passage à l'hôpital de Saint-Jérôme, le 21 février 2009. Celui qui était cardiologue à cet endroit, y est resté quelques heures, et y a été traité pour intoxication au méthanol, avant d'être transféré à l'hôpital Sacré-Coeur. Il a dit beaucoup de choses pendant son bref séjour, le 21. 

«Il dit ne plus se rappeler. Le croyez-vous?», a demandé Me Verret.

Me Verret poursuit sa plaidoirie.

Il est à noter que Isabelle Gaston est présente aujourd'hui, dans la salle d'audience. Depuis l'ouverture du second procès, elle n'était venue que pour livrer témoignage. Elle est accompagnée de sa mère, et de son frère.

La présentation de la preuve a commencé le 24 septembre. Un peu plus de 40 témoins ont été entendus. M. Turcotte est en liberté pour son second procès.